Culture

Alfred Tonnellé, le tourangeau des Pyrénées

Les rives et les coteaux ligériens, pour pittoresques et attachants qu'ils soient, peuvent laisser sur leur faim les imaginaires romantiques, davantage attirés par les escarpements marqués et les reliefs colossaux. C'est peut-être pour cette raison qu'Alfred Tonnellé préféra les sommets pyrénéens aux vallons tourangeaux pour composer l’œuvre qui le rendit célèbre.

Né à Tours le 5 décembre 1831, du médecin Louis Tonnellé, qui dirigea l’école de médecine et de pharmacie et de Pauline Riffault, Alfred excelle dans ses études, maîtrise les langues mortes comme vivantes, et fait preuve d'un insatiable appétit de connaissances, explorant les arts, l'archéologie ou la philosophie. Une curiosité qui le conduit également à voyager, en Allemagne, en Suisse et en Angleterre.

« Paix sublime »

Mais ce sont d'autres contrées qui l'enthousiasmeront. En 1858, à l'occasion de vacances passées à Luchon, où il est invité par le célèbre imprimeur tourangeau Mame et sa famille, Alfred Tonnellé se prend de passion pour les Pyrénées, qu'il découvre d'abord par de petites promenades et excursions. Mais il rencontre bientôt un auteur spécialiste de la région et de sa géographie, qui lui suggère de pousser plus loin l'exploration. Tonnellé ne se fait pas prier et entreprend, avec des guides et quelques autres randonneurs, une ascension du Nethou, qui confirme son engouement. Arrivé au sommet de la crête, il contemple « l’immensité de l’espace, du ciel, de l’horizon, des montagnes. Se sentir planer, nager suspendu au-dessus de tout cela, dégagé, ne tenant à la terre que par un point le plus petit possible », écrit-il. Un peu plus tard, c'est le Bacanère, qu'il gravit à cheval, fasciné par « le sentiment de paix sublime qu'inspire la haute montagne ». Puis c'est le Crabioules qu'il veut gravir et qu’il sera le deuxième à conquérir, après le géomètre Toussaint Lézat, quatre ans auparavant. Là encore, Tonnellé est subjugué, et confie : « La lumière est incomparable. Jamais je n’ai vu l’atmosphère d’une fluidité et d’une pureté si merveilleuse, jamais les tons n’ont été ni vigoureux, si riches, si éclatants. Tout à fait le Midi : voilà ce que je n’ai jamais trouvé dans les Alpes. » Suivront le Sacroux, que Tonnellé se réjouit de gravir par mauvais temps, le Sauvegarde et la cordillère de Maladeta qu'il trouvera triste, la Forcanada, dont il dit : « Si c'était une jeune fille, je crois que j'en deviendrais amoureux ». Une jeune fille encore vierge, qu’ils seront les premiers à séduire, ses guides et lui, en parvenant à son sommet. Et encore le Mont-perdu, les vallées...

Pendant tous ses périples, Tonnellé tient un journal, qui sera publié par Mame un an plus tard, intitulé « Trois mois dans les Pyrénées et dans le midi en 1858, journal de voyage d'Alfred Tonnellé ». Une publication que l'écrivain ne pourra hélas pas fêter. Sur le chemin du retour, voyageant de Perpignan, dans le Languedoc, à Marseille, une fièvre typhoïde l'affecte, qui s’avérera fatale. Rentré à Tours, Tonnellé meurt le 14 octobre à seulement 26 ans. Son journal fera de lui un des pyrénéistes les plus importants, aux côtés d'autres auteurs, locaux ou inspirés par la région, tels qu’Edmond Rostand, Antoine de Bertin, Louis de Fontanes, Alfred de Vigny ou encore Charles Baudelaire et Victor Hugo.

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