Culture

Les salles de bain du Château de Candé

Pour beaucoup, le Domaine de Candé évoque avant tout un événement sulfureux qui a bousculé la couronne britannique : le mariage en 1937 du duc de Windsor et de l’américaine Wallis Simpson. Mais ce château de la Renaissance, agrandi au cours du XIXe siècle, et aujourd’hui propriété du Conseil Départemental d’Indre-et-Loire, se distingue également par son aménagement intérieur singulier, et notamment ses incroyables salles de bains. Découverte d’un château aux airs de Downton Abbey, symbole de modernité.

Le pavillon Renaissance

À la fin du XVe siècle, François Briçonnet, maire de Tours, construit un logis Renaissance sur un éperon calcaire, à la confluence du ruisseau du Saint-Laurent et de l'Indre. Ce pavillon de style Louis XII vient remplacer une motte castrale fortifiée, probablement érigée au Xe siècle, et occupée par les seigneurs de Candé jusqu’en 1499. Briçonnet décède en 1504, alors que la construction du château est toujours en cours. C’est sa fille, Jeanne, qui poursuivra les travaux, achevés en 1508. Nombreux sont les propriétaires qui vont se succéder à Candé, n’apportant pas de véritables changements au logis. Il faut attendre le XIXe siècle et l’acquisition du domaine par Santiago Drake del Castillo, un riche planteur de canne à sucre anglo-cubain, pour que le château opère une importante métamorphose.

Les extensions néogothiques

En 1853, Santiago Drake del Castillo lance une grande campagne de travaux à Candé selon les plans d’un architecte tourangeau renommé, Jacques-Aimé Meffre, avec comme objectif principal, l’agrandissement du château. La superficie habitable est ainsi multipliée par 3, avec l’ajout d’un donjon, d’une chapelle dédiée à sa seconde épouse, d’une école et même d’un hospice. Les façades, de style néogothique, sont embellies de balustrades, de frontons et de peintures. Drake del Castillo entreprend en parallèle de développer l’exploitation agricole et forestière du domaine. Par la suite, le fils de Santiago, Jacques, qui deviendra député d’Indre-et-Loire, poursuit la modernisation du site. En raison de nombreux déboires financiers, le domaine est vendu en 1927 à Charles Bedaux, un homme d'affaires franco-américain.

Le charme des années 30

C’est à Bedaux que l’on doit l’aménagement intérieur audacieux du Château de Candé. Il s’attache ainsi à moderniser toutes les pièces pour en augmenter le confort et l’esthétique et y installe notamment un central téléphonique Bell avec 80 lignes (unique en France à cette époque), une salle de culture physique, un orgue Skinner monumental, et même un solarium. Mais c’est le système d’approvisionnement en eau, particulièrement remarquable, qui va faire de Candé une demeure ultra moderne.

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Une station de pompage est installée à 100 m du château en complément du vaste réseau hydraulique réalisé par Santiago Drake Del Castillo pour irriguer les cultures. Une soixantaine de tuyaux en fonte, cachés dans les murs, vont permettre la mise en place d’un système de chauffage central dans toutes les pièces et l’alimentation en eau chaude « courante » des huit salles de bain du château, jusque dans les étages. Un must pour l’époque ! Une modernité alliée au raffinement des mosaïques art déco en pâte de verre turquoise, mauve et verte réalisées par Henry Jesse et longtemps attribuées à Santé Vallar. La salle de bain de Fern Bedaux, épouse de Charles, est la plus grande (environ 20 m²) et la plus luxueuse du château. Restaurée en 2007, elle est ornée d’une somptueuse mosaïque de nuages et d’une cheminée en marbre de style Louis XV. Cette salle de bain est la seule à posséder une baignoire avec une douchette, dotée d’un ingénieux système qui permet de la remplir et de la vider en quelques secondes.

Et si aujourd’hui, l’intérieur du château est resté figé dans les années 30, les œuvres d’art contemporain installées dans son vaste parc, classé Espace Naturel Sensible, nous rappellent que le domaine de Candé est définitivement un site dans l’air du temps !

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