Culture

Si l’Hôtel du Département m’était conté...

Le Conseil départemental d’Indre-et-Loire partage avec la préfecture un bâtiment édifié sous l’Empire et la Restauration à partir d’un édifice plus ancien, le couvent de la Visitation, construit sous le règne de Louis XIII. Il devait connaître d’importantes transformations tout au long du XIXe siècle.

Les Tourangeaux connaissent bien le bâtiment qui se dresse de l’autre côté de la grille, place de la Préfecture, mais connaissent-ils l’histoire de cet édifice datant de l’Empire et de la Restauration, élevé à partir d’un autre plus ancien, construit entre 1636 et 1639, sous Louis XIII ? Une destination d’origine qui peut surprendre, car la vocation première de ce bâtiment était religieuse : il s’agissait alors du couvent de la Visitation (les Visitandines, cloîtrées, s’établirent à Tours en 1633), né alors que des établissements religieux s’installaient dans le contexte de la Contre-Réforme, dans l’espace vacant entre la vieille ville de Tours et les fortifications bâties sous Henri IV et Louis XIII.

Les architectes de ce couvent sont, suppose-t-on, des personnages renommés : Dom Louis de Saint-Bernard, supérieur des Feuillants de Tours, et Jacques Lemercier, architecte du Roi, à qui l’on doit le château (qui n’existe plus) et la ville de Richelieu, à Paris le Palais-Cardinal (Palais-Royal), la chapelle de la Sorbonne, le Pavillon de l’Horloge et une partie de la Cour carrée du Louvre...

Au centre des convoitises

1789 : la Révolution survient. Et avec elle, dans la continuité, la nationalisation des biens du Clergé et le départ des religieuses. L’installation de l’hôpital de Tours dans le couvent de la Visitation est envisagée. Le général Pommereul, nommé préfet du jeune département d’Indre-et-Loire le 30 novembre 1800, cherche un autre endroit que l’ancienne intendance de Tours pour y exercer ses hautes fonctions. En 1803, le couvent de l’Union chrétienne et celui de la Visitation sont mis à sa disposition, ce dernier pour y transférer, en principe, « le musée, la bibliothèque, le dépôt d’arts et sciences, et autres objets servant à l’instruction publique » alors à l’archevêché. Rappelons qu’à l’époque, des rivalités opposent le préfet Pommereul, le cardinal-archevêque de Boigelin et le général Liébert, commandant la 2e division militaire, pour l’attribution des bâtiments religieux.

Finalement, Pommereul échange l’ancienne intendance contre le couvent de la Visitation, qui sert alors de magasin pour les vivres et le fourrage et la manutention des pains de munition.

Métamorphose

Des travaux de réaménagement et d’extension de l’ancien couvent sont réalisés de 1804 à 1820. Dans les archives des travaux effectués sous l’Empire à l’hôtel de la préfecture, on relève les noms de Poidevin, architecte des bâtiments civils, et de François Deroüet, architecte et capitaine du génie.

Sous le préfet Pommereul, une première aile flanquée de deux pavillons est bâtie côté Est du couvent pour former le logement du préfet, son cabinet et sa salle d’audience, la salle du conseil de préfecture, la salle des assemblées du conseil général et des bureaux. De 1805 datent aussi l’aile Nord, les murs formant l’enceinte de la cour, l’élévation du portail d’entrée et la pose de la grille d’honneur. Le logement du portier est construit en 1805 sur la gauche en entrant par la grille d’honneur, peu après la démolition de l’église des sœurs et du cloître par le préfet Pommereul. Son successeur, le préfet Lambert, approuve en 1807 un nouveau programme de travaux : installation de colonnes de marbre rose entre de fenêtres, rhabillage des murs extérieurs, réfection des escaliers intérieurs, construction d’un porche en arcade pour l’entrée sur la cour d’honneur et de deux pavillons élévation d’un avant-corps du milieu de la façade Sud, d’une nouvelle aile Ouest, puis d’un pavillon destiné aux archives et d’un autre devant accueillir l’école de dessin.

Jardins ouverts

Destinée aux Archives de la Préfecture (elle sera notamment fréquentée par Alexis de Tocqueville), la salle André-Georges Voisin est construite en 1816 au rez-de-chaussée – les archives seront transférées en 1863 dans les salles du premier étage. En 1884, un nouveau bâtiment affecté aux Archives est construit place de la Préfecture.

En 1900, la partie Sud des jardins est ouverte au public. En 1912, de nouveaux travaux sont réalisés, dans le cadre de la visite du président de la République Armand Fallières et du duc Nicolas de Russie à l’occasion des grandes manœuvres de l’Ouest.

À la suite de la décentralisation en 1982, les bâtiments administratifs préfectoraux reviennent au Département (Conseil général puis départemental en 2015). Les services de l’État s’installent dans les bâtiments neufs de la rue Bernard Palissy (inaugurés en 1986). Le préfet conserve l’usage d’environ la moitié des anciens locaux (bureau, cabinet, appartements privés, salon de réception).

 

Sources : Archives départementales d’Indre-et-Loire

 

Repères :

1789 : création des départements, dotés d’un conseil départemental. La France est alors découpée en 83 départements organisés chacun autour d’un chef-lieu, de sorte qu’il n’y ait pas plus d’une journée de cheval pour rallier le chef-lieu depuis les points les plus éloignés du territoire départemental.

1800 : l’organisation est remaniée, le Conseil général apparaît. Dans chaque département, il est mis en place un préfet, un conseil de préfecture et un conseil général. Le préfet détient seul le pouvoir exécutif laissant au Conseil général son rôle d’assemblée délibérante.

1871 : le département, circonscription administrative de l’État, devient une collectivité territoriale par la loi du 10 août.

1982 : la loi de décentralisation du 2 mars transfère l’exercice du pouvoir départemental du préfet au président du Conseil général.

2015 : le Conseil général devient Conseil départemental.

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