Culture

Le petit cheval gris

C’est ce qui s’appelle avoir la main heureuse ! Celle des archéologues du Département en l’occurrence, lorsqu’ils ont découvert une fibule à Joué-lès-Tours. Remarquablement conservé, cet objet métallique nous ramène au temps des Mérovingiens.

Savez-vous ce qu’est une fibule ? Il y a longtemps, très longtemps, cette agrafe servait à attacher les extrémités d’un vêtement. Outre son côté pratique, ce petit objet métallique servait aussi de bijou ; on en déduit que son propriétaire devait jouir d’un certain niveau social.

L’objet que nous vous présentons ce mois-ci est donc une fibule retrouvée en 2017 à Joué-lès-Tours, sur la Zac des Courelières, dans le cadre d’un diagnostic archéologique (qui précède une opération d’aménagement du territoire ou de constructions, et donc d’éventuelles fouilles).

Un endroit déjà connu, le site étant celui d’une agglomération de rang intermédiaire qui a connu diverses occupations au cours de l’Histoire : « Énormément d’objets assez précieux, datant plutôt de la période gallo-romaine, voire gauloise, avaient été trouvés lors de précédentes prospections », rappelle Vincent Hirn, spécialiste du Moyen-Âge au Service de l’Archéologie du Département de l’Indre-et-Loire (Sadil). L’existence d’un « vivier » a été confirmée lors du diagnostic, au cours duquel, de nouveau, beaucoup de choses ont été mises au jour, datant surtout de la période gallo-romaine mais, aussi, cette fibule du VIe ou du VIIe siècle.

Objet précieux

Zoomorphe (autrement dit, en forme d’animal, de cheval dans le cas présent), elle est décorée sur l’avers de onze ocelles – ces petits cercles marqués au poinçon. Faite d’un alliage cuivreux étamé, mesurant 37 mm sur 26, pesant 6,2 grammes, elle a été trouvée dans un petit fossé associé à une voie et bordant un espace funéraire présumé. « Cela signifie qu’il y a de fortes présomptions pour qu’une nécropole du haut Moyen-Âge soit à proximité », indique Vincent Hirn. Mais elle n’a pas été retrouvée dans une tombe, « ce qui aurait été trop beau ! Le fait qu’elle provienne d’un fossé indique qu’elle a été probablement perdue. Son métal est trop précieux pour qu’elle ait volontairement été mise au rebut. »

« Un bel objet », confirme l’archéologue avant de préciser qu’étant donné ses dimensions, cette agrafe servait à attacher les extrémités d’un vêtement léger ; pour les capes de laine, il y en avait de plus gros.

Et son heureux possesseur mérovingien alors, qui était-il ? Là, le mystère demeure ; il reste et restera inconnu, aucun indice n’ayant été retrouvé à proximité. Un personnage puissant ? Un paysan aisé ? Un heureux héritier ? Tout est possible...

Déterminer le type d’occupation : une vraie difficulté

Contrairement à l’époque gallo-romaine, qui a laissé des traces de maçonnerie par exemple, ou des marques sur le sol, le haut Moyen-Âge a vu des occupations plus légères – on ne trouve plus de murs d’époque. À Joué, les maisons gallo-romaines des IIIe-IVe siècles en dur n’ont pas été abandonnées pour autant : elles ont été réoccupées aux Ve-VIe siècles par des sépultures, formant ainsi une nécropole. Puis, l’occupation s’est décalée vers l’Est.

C’est là, sur ce site plus oriental, où les diagnostics font état de bâtiments sur poteaux, de fossés, que les creusements ont permis la découverte d’objets très intéressants comme la fibule zoomorphe.

 

Photo Michaël Beigneux, Archives départementales de l’Indre-et-Loire

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