Culture

Mick Jagger en Touraine

Sans doute le leader des Rolling Stones a-t-il écrit, composé, maturé quelques-uns des titres du 24e album studio de son groupe dans son élégant refuge tourangeau, là même où le disque précédent (« A bigger bang ») avait été enregistré, en 2005. Peut-être des maquettes, postées sur Youtube, ont-elles été réalisées à un jet de médiator de la Loire (difficile de l’assurer à 100 %). On se rappelle en tout cas une vidéo pleine d’humour, filmée depuis son petit paradis français, diffusée aux USA, dans le show de Jimmy Fallon, pendant le confinement. Eh oui : parmi toutes ses propriétés, situées de New York à Londres en passant par l’île Moustique, c’est dans celle de Pocé-sur-Cisse qu’il avait choisi d’attendre le retour à la normale.

Coup de projecteur sur Mick Jagger, le châtelain de Fourchette !

Il faut le voir sur cette vidéo de 2020 feuilleter la Nouvelle République, couper des légumes dans sa cuisine, bêcher son potager, bricoler une porte, et surtout, habillé en berger (classe), conduire ses brebis à travers la prairie. Mick Jagger rime avec gentleman-farmer ! Une image éloignée de celle, plus connue, de nightclubber (ça rime aussi)... Un art de vivre qu’il cultive depuis bientôt 44 ans dans son joli château de Fourchette, à Pocé-sur-Cisse, village que savent situer ses innombrables fans à travers la planète.

À vrai dire, l’histoire d’amour entre le chanteur octogénaire des Rolling Stones et la Touraine ne date pas d’aujourd’hui, ni même d’hier, mais d’avant-hier ; c’est tout petit, alors qu’il campait avec ses parents sur l’Ile d’Or, que le jeune vacancier anglais s’amouracha d’Amboise et de ses environs, où il se jura de revenir un jour, idéalement d’y vivre. C’est chose faite depuis 1980, et l’achat de Fourchette, pour 2,2 millions de francs, à un juge parisien. Depuis, « le château, du plus beau XVIIIe (pierre de taille et ardoise), a soigneusement été dissimulé des indiscrétions éventuelles par une double-haie de feuillage », lit-on dans un excellent hors-série de l’Evénement du jeudi consacré au groupe en 1990. Derrière ce mur de verdure, se déploient jardins à la française et à l’anglaise. Le domaine, qui comprend en outre des dépendances, une serre, un court de tennis, une piscine, s’étend sur vingt hectares.

Qui l’a vu ?

Généralement, les fans accourus jusqu’à Pocé pour y apercevoir leur idole en sont pour leurs frais. S’ils ont le droit de rêver, à condition de ne pas prendre racine, devant les grilles closes – signe, dit-on, de la présence de la star sur sa propriété –, ils ne peuvent évidemment pas les franchir. Qui plus est, les Pocéens veillent sur la tranquillité de leur célèbre voisin ; ils sont muets sur ses habitudes précises. Reste l’espoir de le croiser par hasard, à Pocé, à Amboise, ou ailleurs en Touraine... On ne compte plus les anecdotes, plus ou moins anciennes, à ce sujet : invérifiables – Mick qui conduit des auto-stoppeurs jusqu’à bon port, Mick, perdu, qui demande son chemin à un habitant de Candes-Saint-Martin, Mick qui joue au baby-foot avec David Bowie dans un bar du coin – ou attestées : Mick qui se rend à vélo jusqu’au Relais de Bracieux, dans le Loir-et-Cher, d’où le patron le ramènera en voiture après déjeuner, Mick, le chapeau bien enfoncé sur les yeux, qui rejoint depuis le parking du château d’Amboise et en marchant à vive allure la pâtisserie Bigot avant de s’y délecter, dans la petite salle attenante, d’une boisson chaude et d’une douceur maison, Mick qui fait du kayak en famille sur la Loire, Mick incognito, à peine reconnaissable dans sa chemise en satin vert fluo et sous sa casquette à l’envers, qui se désaltère à la fête des canards de Cangey, Mick en couple à la fête de la courge de Montreuil-en-Touraine... et bien sûr, Mick qui célèbre son anniversaire chaque 26 juillet – en tout cas, la plupart des 26 juillet – au château.

Convoi exceptionnel

La folle rumeur d’un concert-surprise des Rolling Stones à Tours s’est dégonflée depuis belle lurette. Mais tout de même : à l’été 2004 et en mars 2005, Keith Richards et (feu) Charlie Watts – Ronnie Wood étant alors indisponible – répondirent favorablement à l’invitation de leur leader d’enregistrer à Pocé, au moins en partie, l’album « A bigger bang ». On se souvient encore de leur arrivée et du dispositif, officieux, mis en place le long du parcours menant de l’aéroport de Tours jusqu’à la maison Jagger. Des hommes en armes, postés à certains points sensibles, étaient chargés de veiller sur ce petit convoi de very Very Important Personnalities...

Le plus grand groupe de rock du monde, actif depuis 60 ans et qui n’en finit pas de donner – ou plutôt de vendre – des concerts, n’avait plus produit d’album de chansons inédites depuis son disque made in Touraine. Fin du jeûne pour ses admirateurs : « Hackney Diamonds » (made in Los Angeles celui-là) est sorti le 20 octobre dernier.

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