Culture

Toponymie des communes de Touraine : Descartes

C’est d’une simplicité redoutable : la ville de Descartes tient son nom du philosophe René Descartes, qui vit le jour dans la commune en 1596. On aurait pu terminer notre article avec cette seule affirmation… Pourtant la toponymie de cette petite cité de 3500 habitants, située dans la vallée de la Creuse Tourangelle à 60km au sud de Tours, regorge d’anecdotes et de rebondissements. Zoom sur la commune de Descartes, la bien nommée !

Haya, La Haye en Touraine, La Haye - Descartes

Au Xe siècle, la localité de Descartes, qui appartient à la Maison des comtes d'Anjou, est connue sous le nom d’ « Haia » ou « Haya », qui désigne en latin une haie, ou un champ entouré d’une haie. À cette époque, un descendant du célèbre Foulques Nerra y fait ériger un château fortifié, aujourd’hui disparu. Autour du XIIe siècle, alors que la châtellenie se mue en baronnie, Haya devient « La Haye en Touraine », avant d’être incorporée au duché-pairie de Montbazon, érigé en 1588 pour Louis de Rohan. Quelques années plus tard, le 31 mars 1596, naît à La Haye en Touraine celui qui deviendra l’un des plus grands philosophes français : René Descartes.

Né à La Haye… ou plutôt sur le chemin de La Haye ? Là est la question ! Une question qui anime les historiens tourangeaux et poitevins depuis le XVIIIe siècle, alors qu’il se murmure que la mère de Descartes aurait accouché sur la route entre Châtellerault et La Haye… Au diable les considérations géographiques : le philosophe, qui dans une lettre à Chanut se dit « né dans les jardins de Touraine », a bel et bien été baptisé dans l’église Saint-Georges quelques jours après sa naissance et a passé les premières années de sa vie dans la maison de sa grand-mère à La Haye, devenue aujourd’hui un musée. N’en déplaise à nos voisins poitevins ! Ainsi, en 1794, souhait est émis de rebaptiser La Haye en La Haye-Descartes, en hommage à l’illustre enfant du pays.

L’histoire d’une gentille rivalité

La Haye-Descartes va conserver son nom jusqu'en 1967 et sa fusion avec sa voisine : Balesmes. La nouvelle entité ainsi formée de la petite ville de La Haye-Descartes (232 hectares) et de la grande commune rurale de Balesmes (3577 hectares) prendra alors définitivement le nom du père de la philosophie moderne. Un rapprochement qui n’est pas sans poser quelques problèmes de logistiques et qui fut même source d’une gentille rivalité, comme le rappelle Bruno MEREAU, maire de Descartes depuis 2020 : « Il y avait deux mairies, deux églises, deux cimetières, deux écoles… Aujourd’hui encore, il y a les enfants de l’école de Balesmes et les enfants de l’école de Descartes. Des équipements en double, c’est une double charge et donc parfois, des problèmes de gestion. ».

Si de nos jours, cette querelle de clocher tend à disparaître, le premier magistrat de la ville, qui nous précise avec humour qu’il est lui-même né à Balesmes, rappelle qu’en 1989, des balesmois appelaient à « corner » le coin de leur bulletin de vote lors des élections européennes pour protester contre la fusion… près de 20 ans après ! 170 bulletins auraient alors été pliés… Un pied-de-nez tout indiqué pour cette commune surnommée la « cité papetière », qui a longtemps fabriqué divers papiers d'impression pour l'édition et pour l'administration…

La commune aux surnoms

Car si le nom de Descartes est sujet à anecdotes, ces surnoms nous offrent à voir un autre pan de l’histoire de la commune, tout aussi passionnant. Ainsi, en 1857, profitant de l'énergie hydraulique produite par la Creuse, Charles de Montgolfier, Alfred et Ernest Mame, M. Hettere et les banquiers Henri et Eugène Gouin créent une papeterie à Descartes, baptisée "Charles de Montgolfier et Compagnie", qui emploiera jusqu’à 500 personnes en 1950. C’est alors une véritable « cité papetière », réalisée sur le modèle des corons dans le Nord, qui voit le jour à proximité de l’usine, avec des maisons à étage pour les contremaîtres et d’autres plus simples pour les ouvriers. Une industrie qui, au fil des années, a connu des fortunes diverses, mais qui se perpétue toujours aujourd’hui, notamment avec l’imprimerie Baugé.

Si le papier a fait les belles heures de Descartes, c’est sous un autre surnom, qui s’y rapporte peu ou prou, que l’on connaît également la commune : la « cité des trois René ». Car Descartes n’est pas seulement la ville natale du célèbre philosophe. Elle est également le lieu de naissance de deux autres personnalités de la littérature : René Boylesve, romancier et membre de l'Académie Française et René de Buxeuil, chansonnier et compositeur du début du 20e siècle. Une terre d’écrivain donc, qui ne saurait faire oublier l’autre personnalité qui fait la renommée de Descartes : l’ingénieur, physicien et chimiste Gustave Trouvé, inventeur de la pile électrique et du tout premier véhicule électrique : un tricycle, bientôt exposé dans la commune.

La petite ville de demain

Aujourd’hui, c’est grâce à une toute nouvelle appellation que Monsieur le Maire souhaite faire connaître sa cité. Avec le programme « Petites villes de demain » qui consiste à faciliter les « projets de revitalisation des villes de moins de 20 000 habitants exerçant des fonctions de centralité », Bruno MEREAU veut redynamiser le centre-ville et redonner de l’attractivité aux entreprises pour améliorer toujours plus la qualité de vie des habitants. Une qualité de vie déjà favorisée par ses commerces, ses animations, ses nombreux équipements sportifs (vélodrome, dojo, tennis couvert, salle de sport, piste de bmx, piscine…) et culturels (cinéma, musée Descartes, école de musique, bibliothèque…), mais également par la mise en place de la voie verte Sud Touraine désormais finalisée jusqu’à Tournon-Saint-Pierre. Station verte de vacances, ville fleurie, pôle industriel… Indéniablement, Descartes a beaucoup à offrir, et notamment, comme le rappelle son logo, « une véritable philosophie de vie ».

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