JonOne

JonOne

“Une explosion de couleurs, d’énergie, de créativité”

Depuis son arrivée à Paris à la fin des années 1980, l’artiste américain JonOne est passé des rues aux galeries d’art. En écho à son exposition à l’Hôtel Goüin du 12 mai au 28 août, il revient avec nous sur son parcours artistique.

Vous avez débuté à New York, avec l’art de rue, le graffiti. Vous vous imaginiez à l’époque exposer un jour dans des galeries internationales ?

Pas du tout ! Je voyais le monde de l’art comme un domaine tellement élitiste, que j’ai toujours pensé que je resterais un artiste de rue, à peindre des métros, des trains, un artiste underground. Mais être artiste dans l’obscurité est quelque chose de dur. Passer dans la lumière n’est pas simple non plus : j’ai dû découvrir de nouveaux codes, un nouveau langage, un nouveau public… C’était un vrai défi, mais les choses ont évolué petit à petit dans ma carrière. Avant, les gens passaient devant mes œuvres, dans les rues, et maintenant ils se déplacent pour voir mon travail, c’est toujours aussi incroyable !

On associe souvent l’art du graffiti à la peinture en spray, mais vous peignez beaucoup au pinceau…

Il y a des artistes qui peignent uniquement à la bombe, parce qu’ils sont moins bons avec des pinceaux, et qu’ils aiment bien la vitesse du spray ; ils maîtrisent les différentes techniques de bombes, qui sont parfois spectaculaires. Dans mon cas, je voulais toucher un peu à tout, des fois parce que je n’avais pas de bombe, et je ne voulais pas que ça m’empêche de peindre. C’est peut-être une des raisons pour lesquelles j’ai réussi, le fait de travailler aussi bien au pastel sur papier qu’à la peinture acrylique ou à l’huile ? J’aime en tout cas travailler avec des techniques différentes, cela m’aide à développer mon langage.

Vous avez l’occasion de discuter avec les visiteurs de vos expos ?

J’essaie, le plus souvent possible. Parfois certaines personnes viennent de loin pour me rencontrer, quand elles suivent mon travail depuis longtemps. Un vieux monsieur m’a dit un jour “Jon, chaque fois que je vois tes œuvres, ça me donne LA PÊCHE !”. J’étais vraiment touché.

"JEVEUXPEINDRETOUTLETEMPS"

Et peindre vous donne la pêche à vous aussi ?

Je n’ai pas le choix, je veux peindre, tout le temps. Je n’ai pas le temps de me reposer. La vie est tellement magique ! Il y a tellement de choses à faire, je ne peux pas et je ne veux pas m’arrêter !

Quelle a été votre première impression en découvrant l’Hôtel Goüin qui accueille votre exposition “The big takeover” ?

Ma première impression ? c’était “Wouaw !” Le lieu est superbe. L’emplacement en centre-ville est incroyable, et le lieu et son histoire sont incroyables. La façade sculptée est d’une grande richesse. Et en même temps c’est un parfait lieu d’exposition : quand tu rentres dans l’espace, les œuvres ne sont pas écrasées par le monument et son histoire, ce qui n’est pas toujours le cas dans les monuments historiques. Ici, au contraire, les œuvres sont mises en valeur, dans un lieu qui continue à vivre, depuis le savoir-faire des artisans d’autrefois jusqu’aux artistes qui y exposent aujourd’hui.

Et comment avez-vous imaginé l’exposition ?

C’est une exposition de grands formats, avec aussi des installations, des performances… Je le vois comme un lieu d’expression, une explosion de couleurs, d’énergie, et aussi de légèreté. Je souhaite que les gens qui viennent se trouvent dans un lieu qui est différent du monde dans lequel on vit aujourd’hui, chargé d’actualités négatives. Un lieu d’espoir et de créativité, d’énergie, de vie.

Paris est aussi tout cela pour vous ?

J’aime les gens ici, en France. J’ai rencontré des criminels, des policiers, des gens qui vivent en HLM et même un président de la République, et je trouve les habitants courageux (chiants aussi parfois), mais tellement incroyables ! J’ai été « à l’école » d’Agnès B., une des premières personnes que j’ai rencontrées en France. Dans ses fêtes, un percussionniste africain jouait avec un violoncelliste, tandis qu’on dégustait du thé du Maghreb… Quand je dis « être à son école » c’est qu’elle m’a appris à ouvrir les yeux sur la diversité et la richesse culturelle de ce pays. Jean-François Bizot, à Radio Nova, était de ceux-là aussi : un aventurier de la culture, il ramenait d’Afrique des musiques qu’il était impatient de partager. Et ces gens m’ont accueilli comme un artiste, comme un des leurs, car il n’y a pas de frontières dans le monde de l’art, et encore moins dans le street-art. Quel que soit le pays où je vais, je sais que j’y trouverais une famille d’artistes, et je ne sais pas s’il existe un autre mouvement aussi universel que le street-art. Et j’espère que le public tourangeau y sera sensible !

 

The Big Takeover, exposition du 12 mai au 28 août à l’Hôtel Goüin

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